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2 minutes pour comprendre l’étrange univers de Jacobsen

Publié le 21 Febrero 2020

Jusqu’au 31 mai 2020, le musée Bourdelle accueille la toute première exposition française consacrée au sculpteur et céramiste danois Niels Hansen Jacobsen. Contemporain méconnu d’Antoine Bourdelle, son œuvre est marquée par un goût pour l’étrange, l’ambigu, voire le macabre…

Jacobsen

Henriette Hahn-Brinckmann (1862-1934), Crépuscule : portrait du sculpteur Niels Hansen Jacobsen, vers 1900-1904, Vejen, Vejen Kunstmuseum

Originaire d’une petite ville du sud du Danemark, Niels Hansen Jacobsen (1861-1941) s’installe à Paris en 1892,  où il restera dix ans dans un atelier du boulevard Arago – pas si loin, donc, de l’atelier du grand Bourdelle depuis transformé en musée !

L’exposition s’attarde sur cette période parisienne riche en rencontres : Jacobsen fréquente des artistes symbolistes, dont l’imaginaire débridé l’influence durablement. Confrontant ses œuvres à celles de Bourdelle, Redon, Carriès, Moreau, Kupka... l’exposition offre ainsi une petite mais spectaculaire anthologie du premier symbolisme français.

L’entourage multiple d’un artiste danois

Jacobsen

Eugène Grasset (1845-1917), Trois femmes et trois loups, vers 1892, Paris, musée des Arts décoratifs

Lorsque Niels Hansen Jacobsen arrive à Paris en 1892, la ville est de plus en plus cosmopolite. Les Américains y viennent en nombre pour suivre la mouvance impressionniste, et ils ne sont pas les seuls : Montparnasse et Montmartre deviennent petit à petit des ruches fourmillantes d’artistes de toute l’Europe.

Dans son atelier du boulevard Arago, sorte de « couvent artistique », Jacobsen est entouré de ses amis danois, les peintres Axel Hou, Jens Lund, Henriette Hahn ou encore Johannes Holbeck. L’émulation est d’autant plus vive qu’ils y côtoient des acteurs majeurs du symbolisme : comme le céramiste Jean Carriès, voisin d’atelier de Jacobsen, qui façonne dans la terre d’improbables grenouilles à oreilles de lapin… Ou encore le dessinateur Art Nouveau Eugène Grasset dont certaines illustrations singulières sont fortement marquées par le symbolisme comme l’aquarelle Trois femmes et trois loups vers 1892, qui renvoie aux fantasmagories de la forêt.

Toutes ces rencontres nourrissent ses influences, très loin de la tendance au naturalisme de la fin du XIXème siècle… Et Jacobsen va, lui aussi, chercher dans la littérature fantastique et dans les contes ses motifs les plus énigmatiques.

Un artiste nourri de mythes et de contes

Jacobsen vue d'exposition

La Petite Sirène de Jacobsen - Vue de l'exposition, photo : Hélène Boubée

Première œuvre majeure de l’exposition : La Petite Sirène de Jacobsen datant de 1901, adaptation de plâtre du célèbre conte d’Andersen (1805-1875). Un choix qui révèle toute l’attention du sculpteur aux récits et aux créatures fantastiques qui participent à l’étrangeté de son œuvre.

Plus loin, le Troll qui flaire la chair de chrétiens de 1896 impressionne par son élan et ses formes pointues, vigoureuses… effrayantes, aussi. Le troll est une figure emblématique du folklore scandinave : bien que ressemblant à l’homme, il porte des cornes, une queue et des serres à trois doigts, et émerge de la forêt sombre.

Jacobsen vue d'exposition

L’Ombre de Jacobsen - Vue d'exposition, photo : Claire Delfino

Niels Hansen Jacobsen s’intéresse aux insaisissables mystères de l’existence, et tâche en 1897 de représenter L’Ombre dans un mouvement de bronze onirique, qui là encore s’inspire du conte éponyme d’Andersen. Tout comme sa très sombre La Mort et la Mère, qui termine le parcours sur une note dramatique.

Jacobsen, un amoureux de la céramique

Jacobsen poterie

Niels Hansen Jacobsen (1861-1941), Ensemble de coupes, vases, pots, vers 1896-1903. Grès émaillé. Vejen, Vejen Kunstmuseum. Photo © Pernille Klemp

« Ce qui me plaît dans la céramique, c’est que l’on crée soi-même la matière... » Niels Hansen Jacobsen.

Jacobsen était aussi un fou de céramique qu’il commence à pratiquer vers le milieu des années 1890 et ne cesse d’expérimenter. Il crée des pots et des sculptures affaissées, aux émaux dégoulinants, s’amuse avec cet aspect « raté » et en fait le cœur de son travail.

Comme bien des céramistes à la même période – qui ont découvert la beauté brute des pots en grès japonais à l’Exposition universelle de 1878 –, Jacobsen s’emploie à explorer les surépaisseurs, les coulures, les compositions asymétriques, les assemblages… Ses cruches noueuses et étranges ont d’ailleurs quelque chose de nordique, de trollesque.

L’exposition profite de cette passion pour faire le point sur les différentes techniques de la céramique, notamment grâce à une petite vidéo explicative. Et présente plusieurs vitrines de pots et de sculptures en grès émaillé, aux couleurs aussi lyriques que les motifs venus des contes étranges d’Andersen !

En savoir plus sur l'exposition

Les contes étranges de N. H. Jacobsen
Jusqu’au 31 mai 2020
Musée Bourdelle
18, rue Antoine Bourdelle
75015 Paris

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